Une puce un beau soir d'hiver
S'en fut dans un couvent de nonnes
Elle monte au dortoir... Personne
Les nonnes n'étaient qu'au dessert
- "En attendant que l'on se couche"
Dit notre puce en sautillant
"Entrons, entrons dans cette chambre
Faufilons nous dans un bon lit
On est toujours aise en décembre
De savoir où passer la nuit"
Elle dit et d'un saut agile
Elle est sur le haut d'un coussin
Puis en un clin d'oeil se faufile
Sous les draps jusqu'au traversin
Il était temps ! Déjà les Vierges
Franchissaient le seuil du dortoir
Chantant à la lueur des cierges
Les oraisons de chaque soir
Le lit refuge de la puce
Fut occupé en cet instant
Par la jeune soeur Sainte Luce
Âgée à peine de seize ans
- "Oh ! oh ! dit l'insecte, merveille !
Voilà du gibier superfin !
cette nuit pour le coup je veille
Je veille jusqu'au lendemain"
En l'élançant sur la novice
Elle tâte le corps un instant
Enfin s'arête sur la cuisse
Cherchant à mordre à belle dents
La nonne sentant la piqûre
Vite, veut y porter la main
l'insecte saute et sa morsure
Se fait sentir au bout du sein.
La nonne frappe de plus belle
La chasse, la poursuit partout
Mais plus prompte s'une étincelle
La puce fuit... devinez où ?
Le dire serait malhonnête
En présence d'honnêtes gens
Pourtant ce n'était pas si bête
D'aller se fourrer dedans
Enfin pas ses doigts chatouillée
La nonne se pâme bientôt
Et puis se sent mouillée
D'un jus pour elle tout nouveau.
Quant à l'insecte, moi j'ignore
Ce qu'il a pu faire à l'instant
Mais tous les soirs, la none encore
Cherche des puces là-dedans...
